Extrait du magazine Nouvelles et Récits N°1

Alfredo n’est pas trop bien rangé dans sa tête. Il regarde machinalement l’heure à la montre qu’il n’a pas. A vue de nez, il pourrait dire qu’il est 6 heures 10  parce que le café de la gare ouvre à 6 heures pile. Il connaît le patron depuis longtemps, un type réglo qui ne le ferait pas attendre parce que lui, Alfredo, c’est un bon client : tous les matins, le maître de maison il lui sert un petit ballon de rouge au bout du bar avant même qu’il ait eu le temps d’ouvrir la bouche. Et chaque fois, Alfredo se dit « il est fort ce mec, il lit dans les pensées… faut quand même le faire… j’arrive et hop ! mon verre surgit de nulle part et se pose devant moi, rempli à ras bord et sans même en renverser une seule goutte… » ; il dit que ça le requinque de sa nuit passée à la belle étoile mais, ce matin, personne ne l’écoute. Il n’y avait bien que René pour lui prêter une oreille attentive et débattre avec lui de tas de sujets et pas des moindres… !